BAKAS, BANTUS
ENGLISH :
As a people of the equatorial forests of Africa, the Baka pygmies are going through a period of profound changes. Their traditional way of life, based on hunting and gathering, is gradually being eroded by modernisation and their interactions with neighbouring Bantu communities. Economically dependent on the Bantus, often exploited or marginalized, the Bakas must navigate tense relationships while striving to preserve their identity in the face of a lifestyle slipping out of their control.
The Bakas, or pygmies, are a semi-nomadic hunting and gathering people living in the West African equatorial forest. They live in Cameroon, Gabon, the Republic of Congo and the Central African Republic, and are estimated to number around 300,000. Most of them live in small communities alongside the Bantu, the majority ethnic group in the region. Over the last few decades, the Baka people have been violently confronted with the modernisation of society, gradually abandoning their traditional way of life in the forest to join the Bantu villages along the tracks. Where hunting and gathering used to be their main means of subsistence, they are now sharing their time in the forest with their Bantu neighbours, in particular to carry out agricultural or logging work. Ironically, the Bakas, who have the greatest knowledge of the equatorial forest, are actively involved in deforestation, working for Bantu companies to fell trees and transport them to the airstrips. As cheap labour, they are frequently the victims of injustice and persecution, and relations between the two peoples are strained.
The Bakas have always hunted small animals for their own consumption using traps and slingshots, and caught river fish without endangering the biodiversity of the forests. As demand for bushmeat increases, poaching is becoming a widespread practice among the Bantu, who hunt larger animals with rifles to sell the meat. The Bakas have to go further and further into the forest to hunt game that is becoming scarcer, and it is more difficult than before for them to feed themselves exclusively through hunting, fishing and gathering. They are dependent on money from the Bantus and are forced to work for a wage of 500 to 1,000 CFA francs per working day, or around 0.75 to 1.50 euros. Some Bakas also cultivate their own fields, particularly cocoa, but this sometimes leads to conflict with other Bantu farmers who dispute ownership of the land.
The Lobéké National Park is one of the organisers of the « Festibaba » Baka-Bantu festival in Mambélé, in south-east Cameroon. While on the surface the festival aims to promote peaceful coexistence between the two peoples, the national park is now off-limits to the Bakas, whose ancestors have lived there for several centuries. Many Bakas report violent reprisals perpetrated against them by the eco-guards who watch over the park. Most of the time, they have no identity card and are under the guardianship of the state for administrative and political decisions affecting them, which makes them particularly vulnerable.
In 1972, a mission of Spiritan sisters created the village of Le Bosquet, in south-east Cameroon, to bring together the Bakas inhabitants of the region who felt threatened by the Bantus. They built a dispensary there, where they treat the population on a daily basis, and a church where an Orthodox mass is held every Sunday. The Baka people traditionally practice animist worship of Endjengui, the God of the forest. Increasingly, in villages where Bantu and Baka live side by side, this cult is blending with the orthodox Christian religion, which is practised mainly by the Bantu.
The Baka people are currently facing the full force of modernity, with the rapid and forced transformation of their traditional way of life hitting them hard due to their vulnerability to their Bantu neighbors. This upheaval is accompanied by signs of distress, such as alcoholism. However, it is a cultural change, not the disappearance of this people that is taking place, and the major shift they are currently undergoing involves a major challenge: adaptation.
FRANÇAIS :
BAKAS, BANTOUS
Peuple des forêts équatoriales d’Afrique, les pygmées Bakas traversent une période de profonds changements. Leur mode de vie traditionnel, fondé sur la chasse et la cueillette, s’efface peu à peu sous l’effet de la modernisation et de leurs interactions avec les communautés Bantoues voisines. Dépendants économiquement des Bantous, souvent exploités ou marginalisés, les Bakas doivent composer avec des relations tendues tout en tentant de préserver leur identité face à un mode de vie qui leur échappe.
Les Bakas, ou pygmées, sont un peuple des chasseurs cueilleurs semi-nomades vivant dans la forêt équatoriale ouest-africaine. Répartis entre le Cameroun, le Gabon, la République du Congo et la République centraficaine, leur nombre est estimé à environ 300 000. Ils vivent pour la plupart en petites communautés et cohabitent avec les Bantous, l’ethnie majoritaire de la région. Depuis quelques dizaines d’années, le peuple Baka est confronté de manière violente à la modernisation de la société, et abandonne progressivement son mode de vie traditionnel en forêt pour rejoindre les villages Bantous le long des pistes. Alors que la chasse et la cueillette étaient auparavant leur moyen de subsistance principal, ils partagent à présent leur temps en forêt avec celui au service de leurs voisins Bantous, notamment pour effectuer des travaux agricoles ou d’exploitation forestière. Ironie du sort, les Bakas qui sont les plus fins connaisseurs de la forêt équatoriale participent activement à la déforestation en travaillant pour des entreprises bantoues à l’abattage des arbres et à leur transport jusqu’aux pistes. Main d’œuvre bon marché, ils sont fréquemment victimes d’injustices et de persécutions, et la relation entre les deux peuples est tendue.
Depuis toujours, les Bakas chassent pour leur propre consommation des petits animaux à l’aide de pièges et de lance-pierres, et pêchent des poissons de rivière sans mettre en péril la biodiversité des forêts. La demande de viande de brousse étant de plus en plus forte, le braconnage est une pratique quant à elle qui devient répandue chez les Bantous, qui chassent au fusil de plus gros animaux pour en revendre la viande. Les Bakas doivent aller toujours plus loin dans la forêt pour chasser un gibier qui se fait rare, et il leur est plus difficile qu’auparavant de se nourrir exclusivement grâce à la chasse, la pêche et la cueillette. Ils sont dépendants de l’argent des Bantous et se voient contraints à travailler pour un salaire de 500 à 1000 Francs CFA par journée de travail, soit environ 0,75 à 1,50 euros. Certains Bakas cultivent aussi leurs propres champs, notamment de cacao, mais cela crée parfois des conflits avec d’autres agriculteurs Bantous qui contestent la propriété des terres.
Le parc national de Lobéké est un des organisateurs du festival Baka-Bantou « Festibaba » de Mambélé, dans le Sud-Est du Cameroun. Alors qu’en apparence le festival souhaite faire la promotion d’une coexistence pacifique entre les deux peuples, le parc national est à présent interdit aux Bakas, dont les ancêtres y vivaient pourtant depuis plusieurs siècles. Beaucoup de Bakas rapportent les représailles violentes qu’ils subissent perpétrées par les éco-gardes qui surveillent le parc. La plupart du temps, ils ne disposent pas de carte d’identité et sont sous la tutelle de l’état par rapport décisions administratives et politiques les concernant, ce qui les rend particulièrement vulnérables.
En 1972, une mission de sœurs spiritaines créa le village du Bosquet, dans le Sud-Est du Cameroun, pour rassembler les habitants Bakas de la région qui se sentaient menacés par les Bantous. Elles y firent construire un dispensaire, où elles soignent quotidiennement la population, et une église dans laquelle se tient une messe orthodoxe tous les dimanches. Le peuple baka pratique traditionnellement un culte animiste pour l’Endjengui, le Dieu de la forêt. De plus en plus, dans les villages où Bantous et Bakas se côtoient, ce culte se mêle à la religion chrétienne orthodoxe, pratiquée majoritairement chez les Bantous.
Ainsi, le peuple Baka subit actuellement de plein fouet l’arrivée de la modernité, et la transformation forcée et rapide de son mode de vie traditionnel est brutale en raison de sa vulnérabilité face à ses voisins Bantous, et s’accompagne de symptômes de mal-être comme l’alcoolisme. Pourtant, c’est bien un changement culturel et non une disparition de ce peuple qui s’opère, et le grand virage qu’il vit actuellement est celui d’un enjeu de taille : l’adaptation.